Mission 3 [Solo] Cris du Coeur

Sujet: Mission 3 [Solo] Cris du Coeur Ven 10 Fév - 17:35

Finalement, Nathanaël s’était rendu physiquement à la Guilde. Toutes les missions n’étaient pas forcément sur le réseau, après tout ; il y avait toujours quelques irréductibles qui n’avaient pas les technologies nécessaires ou qui pensaient le papier plus fiable que la donnée. Pour lui, c’était parfaitement égal. La seule chose qui comptait, c’est qu’il puisse accéder à d’autres missions que celles qui lui avaient été proposées, espérant ainsi en trouver une qui puisse lui convenir mieux. Il s’était donc posté devant le grand panneau en bois où on placardait des feuilles de papier multicolores et griffonnées, où s’enchaînaient les messages d’appels à l’aide et de supplications.

Devant une telle étendue de possibilités, il s’était retrouvé égaré, emporté dans un tourbillon de mots et de demandes. Il laissait ses yeux jaunes bondir d’une mission à l’autre, n’en trouvant aucune qui ne l’intéressait. Trop compliqué, trop long, pas assez bien payé, nécessitant des talents spécifiques… Il était déjà presque midi, donc la plupart des missions correspondant à ses critères avaient sans doute déjà été prises par les équipes diurnes, puisqu’elles étaient aussi convenant à beaucoup d’autres. Il soupira de désespoir et en décrocha quelques-unes pour les examiner de plus près.

Après lecture attentive de la pile de papiers qu’il avait attrapés, il se rendit à l’évidence : aucune d’entre elles ne convenait parfaitement à ce qu’il recherchait. Il allait devoir faire un effort et abandonner un de ses critères. Soit je sacrifie quelque chose, soit je dors dehors en solitaire ce soir… Il grimaça à cette simple pensée, se la répétant sans cesse pour se garder motivé. Il n’avait pas envie d’être seul, dehors, comme un clochard. Il repensa alors à Daniel et Sylvain, qui auraient pu l’héberger, peut-être. Il baissa les oreilles, cherchant à chasser leur vision de son esprit. S’il avait mieux agi au lieu de jouer les égoïstes, peut-être ne serait-il pas trouvé dans une telle impasse.

Il s’arrêta sur les mots d’un Chuchmur au même instant. Il y expliquait, en peu de mots, qu’il était retenu et maltraité par des Pokémon Combat à cause de ses chants et qu’il demandait un rapatriement à Bourg-Trésor dans les plus brefs délais. La feuille, jaunie à cause de l’ancienneté, était couverte de plusieurs notes indiquant qu’elle avait été prise en charge… Mais toutes avaient été rayées. Apparemment, cette mission avait été abandonnée un bon nombre de fois… En regardant la récompense, il écarquilla les yeux. Elle est gigantesque ! Avec ça, je pourrais carrément m’acheter mon chez-moi au lieu de le louer ! pensa-t-il.

Il pesa le pour et le contre mentalement. La mission devait sans doute être très difficile, et d’après les indications, le Chuchmur ignorait tout à fait sa propre position. Il pouvait le trouver en quelques heures comme mettre bien plus longtemps. Cependant, ce n’était pas ce qui occupait réellement son esprit. Si je réussis cette mission malgré sa dangerosité, je pourrais prouver à tous de quoi je suis capable sans avoir besoin d’aide, une bonne fois pour toutes. C’était plus que décidé : il allait s’y rendre, peu importent les dangers. Peut-être qu’il dormirait à la belle étoile en faisant ça, mais au moins il le ferait pour prouver sa valeur.

Et puis ça pourrait le tenir à l’écart de Bourg-Trésor quelques temps. Il n’avait pas spécialement envie de rester dans le coin, avec le peu de bons contacts qu’il avait. Plus tard, s’il réussissait à rencontrer des gens un peu plus sympathiques et compréhensifs, il aviserait à nouveau pour revenir dans les alentours. Pour le moment, un peu de mise à part lui ferait du bien. Ou peut-être essayait-il juste de s’en persuader, afin de chercher à avoir la conscience tranquille pendant qu’il fuyait. Il attrapa la feuille, l’enregistra, et partit faire ses provisions en dépensant tous les moyens fournis par le Chenipan dans des provisions, des soins, des objets d’utilité diverses.

Étage 1 du Mt Labeur

Il embarqua au début de l’après-midi sur un Dracolosse transporteur. Sa destination, le Mont Labeur, était extrêmement éloignée de la ville, l’obligeant à un moyen de transport plus rapide. Ce serait lui qui le rapatrierait dès qu’il aurait localisé et secouru le Chuchmur, normalement. Le baptême de l’air de Nathanaël fut un événement assez désagréable. L’huile de sa fourrure était emportée aux quatre vents, et il peinait à s’accrocher à cause de celle-ci, poussant des miaulements de terreur à chaque fois que sa monture daignait accélérer. Ils parvinrent au milieu de l’après-midi au pied du Donjon Mystère où son client était retenu, ce qui n’aurait pas pu être trop tôt. Descendant du Dracolosse, soulagé, Nathanaël lui adressa un bref remerciement et observa d’un air inquiet les pics qui montaient jusqu’aux cieux.

« T’es sûr que t’es prêt à ça, gamin ? demanda son accompagnateur, soucieux. Les Pokémon du Mt Labeur ne déconnent pas, tu sais. Même si tu passes un appel de secours, je suis pas sûr de pouvoir arriver à temps.
- Je sais ce que je fais, merci, » répliqua-t-il froidement. Bien qu’il prétendait le contraire, lui-même doutait encore de ce qu’il faisait. Plus il s’était rapproché du lieu de sa mission, et plus il avait commencé à en peser le véritable danger ; à présent qu’il faisait face à cette grande chaîne de montagnes, il réalisait qu’il n’était clairement pas à la hauteur de la responsabilité. Néanmoins, il était allé beaucoup trop loin pour reculer. « Bon, si tu le dis, » répondit le Dracolosse, masquant son inquiétude derrière un sourire compatissant. « Tente de ne pas te faire tuer. » Il s’envola et disparut dans les cieux, laissant Nathanaël seul face à son destin.

Il soupira. Jusqu’où suis-je prêt à aller pour repousser mes limites… ?

HRP:

Étage 2 du Mt Labeur

Le début de l’ascension de Nathanaël se passa calmement. L’entrée du mont n’était pas spécialement sinueuse ou peuplée, bien au contraire. Il s’agissait d’une petite pente large où le vent soufflait à grande force, portant la fraîcheur des cimes jusque dans les vallées environnantes. Le sol était plus poussiéreux que rocailleux, érodé par les pluies et neiges continuelles venant des pics. C’était presque comme un désert, à ses yeux ; il n’y avait rien, ni arbres, ni point d’eau, ni refuge. Il doutât seulement que quelqu’un puisse vivre ici. Seul avec ses pensées, il continua de monter, examinant les alentours à la recherche d’un indice.

Il repensa à la mission qui lui avait été confiée, et à tous ceux qui semblaient l’avoir abandonnée avant lui. C’était la première fois qu’il en voyait une qui avait été finalement délaissée, qui plus est sans motif… Il eut soudain la crainte que les aventuriers qui s’étaient lancés à la recherche du Chuchmur n’en soient jamais revenus. C’est peut-être un piège pour attirer les explorateurs et les détrousser… pensa t-il au fil de son ascension. Non, ça ne tenait pas la route. Après tout, les précédents avaient laissé des indications concernant les zones du mont déjà explorées par leurs soins, qu’il avait retrouvé au dos de la feuille. Sans ça, il en aurait sans doute pour bien plus longtemps.

Il arriva dans une zone un peu plus étroite, où les reliefs se dessinaient plus clairement. Il avait désormais réellement l’impression d’être en train d’escalader une montagne. Le sol était toujours dans le même état, mais le fait de voir un lieu labyrinthique se former autour de lui le rassurait étrangement. Il savait désormais qu’il était dans un véritable Donjon Mystère. L’atmosphère mystérieuse et l’aura qui émanait du lieu l’emplissait de volonté d’avancer en dépit des difficultés. Il examinait chaque recoin, appelant de temps en temps le nom du Chuchmur, sans entendre de réponse. À part ceux qu'il cherchait, il doutait de toute façon que quiconque n’habite l'endroit.

Il s’approcha de l’éboulement auprès duquel le Dracolosse l’avait déposé. Son client était retenu parce que ses chants avaient provoqué un glissement de terrain, selon ce qu’il avait lu sur la feuille de mission. Explorer les différents endroits où ils avaient eu lieu était donc sa meilleure chance de trouver une piste, mais le véritable problème était que des tas et des tas d’éboulements avaient eu lieu depuis celui dont il était question, et auraient pu masquer celui dont on parlait à l’origine de par leur nombre. Les montagnes étant des lieux plutôt instables, les effondrements étaient nombreux, et la recherche de ceux-ci s’approchait de celle d’une aiguille dans une botte de foin. Néanmoins, il ne trouva rien à proximité de celui-ci.

Le soleil avait commencé à décliner à l’horizon, et disparaissait derrière les hauteurs progressivement, sans qu’il ne fasse déjà nuit pour autant. Plongé dans la pénombre du crépuscule, Nathanaël continuait son chemin à la recherche d’un autre éboulement. Sa solitude, aussi désagréable soit-elle, avait quelque chose de presque reposant. Il n’avait plus à affronter qui que ce soit, et se retrouvait à l’aise, seul avec lui-même. Finalement, contrairement à ce qu’il avait pensé la veille au soir, ce n’était pas si mal de n’avoir personne à proximité. Au moins, il ne craignait ni les reproches, ni les regrets.

C’était sans doute mieux ainsi.

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Étage 3 du Mt Labeur

Plus son ascension continuait et plus la liste des raisons pour lesquelles Nathanaël était parfaitement satisfait de sa solitude défilait dans son esprit. Naïfs, stupides, prétentieux, collants, froussards, possessifs, oppresseurs… Il réalisait à quel point il ne pouvait pas les supporter, et s’apercevait qu’il se portait somme toute bien mieux une fois qu’il était loin d’eux. Cette mission en solitaire, bien que silencieuse, lui permettait de ne pas avoir à materner qui que ce soit. Il était responsable de lui seul ; s’il échouait, il ne pouvait s’en prendre qu’à lui-même. Cette constatation le rassurait autant qu’elle l’angoissait.

Il examina plus attentivement l’entrée d’une grotte, mais n’y trouva rien, et s’aperçut que les alentours semblaient se refermer progressivement sur lui. Les stalagmites rocheuses grimpaient et se tordaient tout autour, semblant former un tunnel isolé du ciel tandis qu’il se rapprochait des hauteurs. Il n’était pas tant monté, mais il avait déjà une magnifique vue sur les environs du Mont Labeur. Il surplombait la région rien qu’en se postant sur un promontoire improvisé, et pouvait voir les biomes environnants, colorés et hétéroclites. Il était presque surpris de voir tant de diversité dans un monde qui lui semblait, somme toute, très petit.

Il voyait les forêts plongées dans la brume au pied d'un volcan en constante éruption. S’il laissait glisser son regard, c’était une chaîne de montagnes longeant l’océan profond qu’il pouvait distinguer. En partant dans l’autre direction, il distinguait des prairies, des collines, mais également un canyon, avec ses teintes rougeoyantes évoquant le soleil. Il avait bien du mal à croire qu’une telle région ait été formée naturellement, par simple œuvre des réactions de la terre, de l’eau, du soleil. Il devait y avoir une quelconque influence supérieure, comme l’avait évoqué Daniel lorsqu’il lui avait parlé de ce monde…

Dieu… Ou Arceus, comme l’avait nommé l’Aligatueur. Jusqu’à présent, Nathanaël ne s’était pas plus penché sur l’existence d’une éventuelle créature divine omnipotente. Il n’avait expliqué ce qui lui était arrivé que par un phénomène quelconque, un sort subi qui l’avait transporté ici. Mais il savait qu’il ne venait pas de ce monde, et qu’il n’avait pas cette apparence. Une créature peut-être vraiment me faire subir tant de changements sans être un Dieu...? Il n’était pas le seul à être atterri ici, il le savait ; mais dans tous les autres cas, de ce que les légendes disaient, c’étaient toujours des créatures aux pouvoirs incommensurables qui provoquaient l’apparition d’humains.

Il quitta sa contemplation de l’environnement pour reprendre ses recherches. Il trouverait la réponse à ses questions en temps et en heure. Il était pressé de rentrer chez lui, et voulait trouver une piste pour expliquer son amnésie et sa transformation, mais il ferait en fonction de ce qu’il trouverait, comme d’habitude. De toute façon, s’il avait une destinée humaine majeure comme le prétendaient les gens, alors elle viendrait à lui toute seule. Il lui suffisait de vivre sa vie comme il l’entendait et les choses s’adapteraient à ce qu’il ferait. Après tout, avenir glorieux ou pas, c’était toujours à lui de choisir comment ça allait se passer.

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Étage 4 du Mt Labeur

Nathanaël, voyant un éboulement qui lui semblait plutôt ancien, examina les alentours de l’endroit où il était parvenu. La nuit approchait doucement et il envisageait de camper bientôt. La marche à travers la montagne ne l’avait pas spécifiquement fatigué mais il préférait être en forme pour demain, si ses recherches dans l’environnement proche s’avéraient infructueuses. Il finit par trouver l’entrée d’une nouvelle grotte et y pénétra silencieusement, s’avisant de ne pas attirer l’attention. Heureusement, la cavité était tout à fait vide, mais cela signifiait qu’une fois de plus, il n’avait pas trouvé de piste pour connaître l’emplacement du Chuchmur.

L’endroit était plutôt étroit sans être minuscule. La paroi était si lisse et si polie qu’elle reflétait doucement la lumière diurne rentrait dans la crevasse. Sa surface ressemblait vaguement à celle d’un miroir sans en être réellement un. Cela émerveillait le jeune explorateur qui s’amusait désormais à jouer avec son reflet comme un petit chaton, donnant des coups de patte à son double inversé. Mais qu’est-ce que je fais ?! pensa-t-il en faisant quelques pas en arrière. Il secoua la tête et décida plutôt d’installer son campement et d’aller dormir avant de continuer à agir comme un enfant décérébré. Il valait beaucoup mieux que ça.

Il sortit une pierre lumineuse de son sac et la posa sur le sol pour éclairer les alentours, avant de tirer une couverture qu’il avait achetée, puis s’installa dessus. Il poussa un long soupir et hésita à prendre à manger. Il n’avait pas tant de réserves de nourriture que ça, et pas réellement faim non plus pour autant. Il posa sa tête sur ses pattes, avant d’entendre un doux murmure inquiétant derrière lui. Il fit volte-face, examinant les alentours. D’où vient cette voix ? J’hallucine ou quoi ? « Eh, s’il y a quelqu’un, montrez-vous ! » cria-t-il, agacé. Il espérait sincèrement qu’il ne délirait pas.

Du mur jaillit soudain une forme spectrale précédemment invisible qui lui porta un redoutable coup de faux au visage avant de le traverser pour le contourner. Son sang gicla sur le sol et il poussa un puissant feulement de douleur, une couleur écarlate teintant sa fourrure. De rage, il se retourna et hurla contre son adversaire, une sorte de mue d’insecte ailée avec une auréole blanche. Pour Nathanaël, la solution fut plus qu’évidente : il allait la calciner jusqu’à ce qu’il n’en reste rien. Léchant sa patte avant de long en large, il chargea la chaleur contenue dans sa gorge et cracha un long jet de feu qui réduisit littéralement en cendres la créature inconnue.

Combat !:

Quoi que puisse être ce monstre, il n’existait désormais plus. Il ne savait pas s'il devait s'en sentir vraiment coupable, au vu de la soudaineté de l'attaque. Ce n’était pas un Pokémon, pas vrai ? se demanda l’explorateur en s’effondrant sur son drap, sa coupure le brûlant douloureusement. Ils ne sont pas capables de traverser les murs comme des fantômes, quand même… Il attrapa dans son sac un des pansements dont il avait fait l’acquisition et l’appliqua sur sa tête, toujours effondré sur son lit de fortune. Il avait terriblement mal, mais il savait que la nuit saurait l’apaiser comme toujours. Néanmoins, la crainte de subir une autre attaque surprise le poussa à ne dormir que d’un œil.

Heureusement, personne ne vint troubler son sommeil.

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Étage 5 du Mt Labeur

Il se remit en chemin dès le lendemain matin pour continuer sa lente ascension vers le sommet, examinant avec attention chaque recoin de la montagne pour tenter de trouver une piste quelconque. Depuis sa rencontre avec l’étrange spectre, il craignait de voir un monstre surgir à tout moment, et le moindre bruit le faisait sursauter. Réalisant que cela augmentait nettement l’efficacité de ses flammes, il avait commencé donc à lécher ses pattes avant pour en récupérer l’huile ; aussi écœurant ce puisse être par moments, il n’avait pas le choix s’il voulait produire suffisamment de feu pour échapper à un ennemi comme ceux auxquels il allait sans doute faire face.

Une nouvelle cavité attira son attention et il s’en approcha, voyant un éboulement proche. Il hésita à y pénétrer, ayant l’impression que le plafond semblait assez peu solide par ici : plusieurs fissures morcelaient les stalactites de roche bordant l’entrée. Il craignait qu’un mouvement trop brusque ne fasse s’effondrer l’endroit. Néanmoins, il devait explorer chaque piste, et celle-ci n’était pas exclue. Il fit quelques pas à l’intérieur, renifla la grotte à la recherche d’une odeur particulière, et s’avança prudemment pour explorer les alentours, sortant la pierre lumineuse pour avoir un meilleur visuel. L’entrée donnait sur un long couloir de roche s’enfonçant dans les ténèbres.

Un craquement sonore fit sursauter Nathanaël et il fit volte-face pour cracher du feu ; mais ce fut un tas de roche qui se présenta à lui, chutant dans un bruit démentiel. Il s’éloigna en toute hâte pour éviter d’être enseveli et vit la lumière du jour disparaître derrière lui. Quand il cessa sa course pour réaliser que l’effondrement avait enfin cessé, ce ne fut que pour constater le nouveau problème. « Oh non… Non, non non, merde !! » s’exclama-t-il en s’en rapprochant aussi vite qu’il avait fui, tentant de pousser les débris. Malgré le soulèvement de poussière et ses coussinets qui ripaient sur les roches, il s’efforça de les dégager, sans succès. Il grimpa dans tous les sens, tenta de trouver un point faible en poussant des jurons, haletant, affolé. Mais rien ne semblait lui offrir une échappatoire.

« Je suis coincé… Putain, je suis coincé, je suis coincé... » s’avoua-t-il finalement, se laissant retomber en bas du tas rocheux, à bout de souffle. Il n’était pas spécialement claustrophobe, mais l’idée de se retrouver coincé sous terre sans possibilité de s’échapper n’était pas pour autant très agréable. Il laissa échapper un long soupir de désespoir et commença à râler contre lui-même ; contre sa bêtise, contre son incapacité à accepter de l’aide, contre son talent pour se mettre dans des situations stupides. « Quel con ! » hurla-t-il, frappant le sol de sa patte avant. « Si seulement j’étais pas rentré, putain de merde… ! » Réalisant que se lamenter ne servait à rien, il décida d’aller explorer le fond de la grotte. Il n’avait rien d’autre à faire de toute façon.

La pierre lumineuse accrochée sur son sac, il s’avançait en la brandissant comme une torche, examinant les alentours à la recherche d’une nouvelle sortie. Le couloir de roche était pentu et semblait grimper plus haut dans la montagne, mais ne lui permettait pas d'apercevoir la lumière du jour. Il continua son chemin dans un silence parfait, anxieux à l’idée de se retrouver piégé sans possibilité de repartir. Il aperçut alors une lumière briller un peu plus long, et s’élança en courant vers la sortie. Mais ce n’en était pas une ; c’était une grande pièce taillée dans la roche, au sol plus poussiéreux, où étaient alignées des croix plantées dans le sol.

Un cimetière. Un gigantesque lieu de repos souterrain où il dénombrait des centaines de tombes, soigneusement préparées pour accueillir tout autant de morts. Des plantes aux fleurs jaunes luisantes brillaient un peu partout, renforçant l’atmosphère macabre de l’endroit. Nathanaël, en faisant un pas en avant, se sentit submergé par l’aura déplaisante qui se dégageait de la cavité. Il n’avait jamais été si proche de la mort, aussi loin qu’il s’en souvienne. Il n’y avait pas d’odeur particulière, pas de sang, rien qui ne puisse indiquer la présence de corps sous terre ; mais les croix avec les noms qui s’enchaînaient étaient des preuves plus que suffisantes pour lui.

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Étage 6 du Mt Labeur

Il s’avança en silence dans l’enfer que représentait pour lui cet endroit. Il n’aimait pas l’ambiance sordide du lieu, avec toutes ces morts qui s’alignaient, apportant un présage sinistre pour la suite. Qu’est-ce qui a pu tuer tant de gens ? se demanda Nathanaël en silence. Ces tombes sont toutes similaires et paraissent aussi anciennes les unes que les autres… Il accéléra le pas, slalomant entre les tombes pour tenter de trouver une sortie. Il trouva une cavité qui semblait mener à l’extérieur : par chance, ce lieu avait plusieurs entrées. Il se mit à courir, un frisson lui remontant le long de l’échine, et il arriva finalement à proximité de la sortie. Il décida de partir sans plus attendre.

Alors qu’il s’avançait, une silhouette s’interposa face à lui. C’était une sorte de petite créature humanoïde et violet clair, avec une crête et des poings marron. L’explorateur s’arrêta, croyant voir un ennemi, et chargea une attaque, mais l’autre l’interrompit en lui faisant un signe pacifique : « Nul besoin d’être hostile, voyageur. Quels sont les motifs qui vous poussent à venir troubler ce lieu de repos ?
- Je passais juste par ici. Je recherche quelqu’un.
- Un explorateur secouriste ? devina-t-il en voyant son badge. J’en ai croisé de nombreux dans ces montagnes, mais pas d’aussi jeunes. Nommez-moi Débugant, car tel est mon nom.
- Nath’ pour moi. »

Le chat s’arrêta, piétina un peu le sol, anxieux, réalisant qu’il ne s’écartait pas. Qu’attend-t-il pour me laisser passer ? Il veut autre chose ? Il hésita à expliciter sa recherche, de crainte que son interlocuteur ne devienne un ennemi. Après tout, la demande parlait de Pokémon Combat hostiles. Méfiant, il demanda : « Qu’est-ce qui s’est passé, ici ?
- Il y a deux ans, un effondrement a causé la mort de nombreux citoyens du village de Guantala, niché plus haut dans la montagne. Je suis le gardien des corps dont la vie a été dérobée par cette catastrophe. » Nathanaël fit immédiatement le lien avec celui qu’avait évoqué le Chuchmur. Cela avait peut-être un rapport ; les dates étaient correspondantes, c’était peut-être un motif suffisant pour l’avoir conduit à être retenu pendant tant de temps. Il l’interrogea davantage : « Le responsable était-il un Chuchmur ?
- Précisément. Il est, depuis, tenu captif au sommet de la montagne par deux de mes camarades.
- Et pourquoi c’est pas la Brigade Magnézone qui s’en charge ?
- Si loin de la civilisation, les Pokémon ont leurs propres lois. Nous vivons en autarcie depuis des générations, alors nous faisons justice nous-même. Cependant... »

C’était stupide. Mais au moins, le conflit semblait prendre des formes plus concrètes. Son client était responsable d’un accident ayant conduit à la mort de nombreux citoyens d’un village, et n’ayant pas obtenu justice pour un motif inconnu, ils avaient décidé de le retenir depuis deux années au sommet… Et le Chuchmur réclamait de l’aide pour qu’on le libère. Mais pourquoi n’avait-il pas explicité clairement sa demande ?! pensa Nath’ en fronçant les sourcils. Cela n’était pas de son ressort : il était un explorateur secouriste, pas un diplomate. Bien qu’ayant une idée plus claire de cette histoire, il réalisait qu’il n’était probablement pas apte à la régler. Le Débugant reprit : « À garder ces âmes en peine, j’ai compris que la vengeance ne pourrait les apaiser. Elles voulaient que nous tournions la page. J’ai tenté de raisonner mes compagnons maintes fois, leur demandant de libérer le Chuchmur, mais je m’y trouve inapte. J’ai donc envoyé une demande de secourisme en son nom… Que vous avez récupérée, n’est-ce pas ? »

Le Flamiaou cligna des yeux, pris par surprise. Le Débugant était donc le messager du Chuchmur. Il reprit : « Ne vous en faites pas, la récompense promise n’était pas un mensonge. Si vous parvenez à libérer le coupable de sa prison où il a bien trop souffert, soyez certain que vous recevrez le payement dû.
- C’est bien lui qui a fait la mission, au moins ? Si c’est pas lui, la mission est invalidée, hein.
- Je me suis contenté de transmettre la demande, rien de plus. Nous n’avons pas le droit de punir nous-même, surtout de façon injuste.
- Écoutez, de toute façon je suis pas venu ici pour régler un souci juridique ou quoi, insista l’explorateur. Je suis là pour casser la tronche de ces types, récupérer mon client, et le rapatrier à Bourg-Trésor.
- C’est exactement ce que vous allez faire. Ne craignez pas d’user de votre force. Ils n’écouteront que ceux qui se montreront plus fort qu’eux, tant en puissance qu’en volonté.
- Et vous ? Pourquoi vous participez pas à l’affrontement ?
- Je ne suis pas à la hauteur, et de toute façon, je préfère rester à part.
- Vous avez peur, surtout, hein ?
- Non. Ce n’est simplement pas mon rôle de combattre mes camarades.
- Pfft. »

Nathanaël soupira. Il ne tirerait rien de celui-là, ce serait à lui seul de gérer le combat, s’il y en avait réellement un. Il espérait que ce ne serait pas trop difficile. Il demanda, blasé : « Vous pouvez au moins me conduire jusque là-haut ?
- Jusqu’au village seulement. Je ne désire pas qu’ils sachent que je vous ai aidé à les rejoindre. De là, vous n’aurez qu’à grimper un peu plus et vous y serez. »

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Étage 7 du Mt Labeur

Ils continuèrent leur chemin jusqu’à revenir à la lumière du jour : en la voyant, Nathanaël feula de plaisir et s’étira, satisfait de pouvoir respirer l’air frais des montagnes, mais surtout d’être libéré de sa prison de roche. Son guide l’interrompit et lui fit signe de se cacher, avant de pointer du doigt une montée abrupte où on voyait plusieurs silhouettes s’affairer. « Nous sommes arrivés au point de passage », murmura le Débugant en se tapissant contre une pierre. « Nous empêchons les voyageurs d’aller plus haut.
- Mais pourquoi ?
- Depuis l’accident avec le Chuchmur, mes confrères refusent de laisser les aventuriers s’approcher des pics les plus élevés, afin d’éviter de provoquer d’autres catastrophes dans notre village. L’atmosphère du Donjon Mystère nous protège des accès aériens, mais pas des voyageurs terrestres. Par conséquent, il y a des péages.
- Laissez-moi deviner, je ne peux pas passer ?
- Non. Ils vous attaqueront même à vue, étant donné que vous avez contourné le premier en passant par le cimetière. En fait, à partir de maintenant, vous êtes potentiellement en danger.
- Ah, super ! s’exclama ironiquement le Flamiaou, ravi d’apprendre qu’il allait probablement se faire maraver la tronche d’une seconde à l’autre par des imbéciles un peu trop territoriaux. Et comment on passe ce péage, au juste ? »

Le Débugant examina les alentours, Nathanaël se penchant avec lui. Il y avait effectivement un groupe de Pokémon Combat et Roche attroupés devant le seul accès vers les hauteurs, gardant le passage avec attention. Aucun autre chemin n’était visible : soit il passait au travers, soit il devait contourner par autre part. Mais au vu du regard inquiet de son guide, il n’y avait pas d’autre solution que de passer par le point de surveillance. Il marmonna, s’adressant à l’explorateur : « Je vais essayer de les distraire pour vous permettre d’avancer. Continuez votre ascension et je vous rattraperai. Tâchez de vous faire discret, d’accord ?
- Bah, c’est pas comme si j’avais spécialement le choix de toute façon ! »

Nullement rassuré par ces mots mais n’ayant pas le choix, l’adjuvant de Nathanaël s’élança en courant et fit des signes paniqués à ses compagnons, leur pointant une direction en criant. Au début, l’explorateur crut qu’il était en fait en train de le dénoncer, et se prépara à détaler à toute allure, se croyant trahi. Mais les gardes passèrent devant lui sans le voir, courant en direction du cimetière pour disparaître dans les ténèbres du tunnel. Il soupira longuement de soulagement, chassant une goutte de sueur illusoire en secouant la tête. Le Débugant le rejoignit et lui ordonna : « Allez-y sans attendre ! Je leur ai fait croire à une attaque massive de Munja et ils m’ont dit de rester ici, mais ils reviendront dès qu’ils s’apercevront que ce n’est pas le cas.
- Et vous ? demanda le chat, plus agacé de se retrouver abandonné si tôt que réellement inquiet.
- Les Munja fuient après leurs attaques donc je n’aurai pas de problèmes s’ils n’en trouvent pas. Mais je dois rester ici. Allez, filez ! »

C’en fut assez pour convaincre Nathanaël, qui se rua en direction de la pente, l’escaladant à toute allure. Il fit un dernier signe à son guide, qui le lui rendit, et il disparut derrière une bute, recommençant son ascension en solitaire pour une durée désormais inconnue.

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Étage 8 du Mt Labeur

Il avançait sans regarder devant lui, soucieux quant à la suite. A partir de maintenant, tous ceux qu’il pourrait croiser étaient de potentiels ennemis ; il ne pouvait plus compter que sur le Débugant. Tous les autres le prendraient pour un intrus, et chercheraient sans doute à se débarrasser de lui dans les plus brefs délais. L’idée de se retrouver seul face à un de ces gigantesques et redoutables Pokémon gardes ne lui plaisait guère. Il se sentait incapable de pouvoir en gérer un s’il se retrouvait face à face avec l’un d’eux. Bientôt arrivé sur de nouvelles hauteurs, il réalisa que les nuages n’étaient plus si loin. Il n’avait pourtant pas l’impression d’avoir tant grimpé.

Il examina les cimes. Il ne voyait pas percer les pointes, et le sommet exact se fondait dans le ciel. C’était là qu’il devait se rendre pour secourir son client, il en était certain, grâce aux indications du Débugant. Néanmoins, le doute le prit. Et s’il s’agissait d’un piège ? Après tout, je ne suis pas certain qu’il soit réellement dans mon camp… Non. Il devait lui faire confiance. Il n’aurait pas pris tant de risques pour l’envoyer aussi loin, et l’aurait livré directement à ses camarades garde si c’était réellement sa volonté. Il aurait pu faire ce qu’il voulait de lui, si c’était réellement son désir. Nathanaël devait croire en sa sincérité.

Soudain, une silhouette rougeoyante apparut devant lui. C’était une sorte d’insecte de métal, qui voletait paisiblement jusqu’au moment où elle aperçut Nathanaël, se stoppant pour mieux le fixer. D’une voix sombre, la créature lui lança : « Qui va là ?! Vous n’êtes pas... » L’explorateur l’interrompit ; léchant sa patte avant de l’épaule jusqu’à l’extrémité de ses doigts, il chauffa son huile et relâcha un redoutable tourbillon de flammes qui calcina l’insecte de face. Cruellement brûlée, elle s’élança sur Nathanaël pour lui asséner un puissant revers de pince qui l’envoya voler à plusieurs mètres.

Combat !:

Il se redressa, presque suffoquant, et donna un nouveau coup de langue sur sa patte. Le monstre s’approcha pour l’achever et il fit volte-face, lui crachant un autre jet de flammes, moins puissant, mais qui suffit à le repousser, et ultimement, le terrasser. Son adversaire s’effondra sur le sol, réduit au silence. Nathanaël, haletant, contempla son œuvre. Il avait réussi à se débarrasser de l’un des gardes, apparemment. Au moins, il respirait encore, mais il était inconscient pour un bon moment. Il n’avait plus de temps à perdre : il devait atteindre le sommet avant qu’on ne sonne l’alerte.

Combat !:

Il attrapa le corps de l’insecte évanoui et le déposa dans des fourrés, à l’abri des regards. Une fois ceci fait, il s’appliqua un baume à base de baies Oran pour soulager la douleur du choc qu’il avait reçu. L’effet ne tarda pas et il se sentit requinqué pour reprendre sa route, ce qu’il fit sans plus tarder. S’il voulait parvenir à secourir le Chuchmur efficacement, il ne devait pas se faire arrêter avant d’atteindre le sommet. Mais il était confiant. Il n’avait jamais été aussi sûr de réussir, aussi difficile puisse paraître cette mission.

Il était allé bien trop loin pour échouer maintenant.

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Étage 9 du Mt Labeur

Il ne suffit que quelques pas supplémentaires à Nathanaël pour approcher de ce qui ressemblait à un maison. A priori, il y avait d’autres Pokémon vivant par ici ; il s’agirait d’être prudent. Il se faufila discrètement jusqu’à celle-ci et la contourna prudemment, s’efforçant de rester le plus silencieux possible. Il s’assura de ne pas renverser le moindre petit rocher, de ne pas frapper le mur de la case qu’il évitait, et parvint de l’autre côté assez aisément. Il soupira de bonheur, ravi de ne pas avoir été remarqué, et reprit sa course. Un cri féminine et assez jeune l’interrompit alors qu’il était à mi-chemin. « Qui êtes-vous et que faites-vous ici ?! »

Combat !:

Il se retourna d’un seul coup et aperçut une sorte de créature humanoïde au corps bleu turquoise, avec une tête en forme d’ail. Il plissa les yeux, étonné par l’aspect étrange de la créature. Pour le moment, elle ne semblait pas décidée à l’attaquer. Peut-être y avait-il moyen de la raisonner, puisqu’il s’agissait probablement d’une jeune fille à première vue : « Je… ne fais que passer.
- Vous n’êtes pas d’ici ! lança-t-elle sévèrement en se mettant en position d'attaque. Faites demi-tour ou je serai contrainte d’attaquer. Je protégerai mon village !
- Je ne suis pas là pour m’en prendre à toi ni aux autres, eh ! Je viens juste récupérer quelqu’un.
- Un explorateur ? Je n’ai pas confiance en ces gens-là ! Ce sont des pilleurs et des coquins seulement attirés par l’argent. C’en est assez ! »

Elle s’élança sur lui à toute allure et Nathanaël tendit ses pattes avant, l’attrapant au vol ; il la projeta dans les airs de toutes ses forces et la jeta vers l’arrière. Son réflexe lui permit de l’envoyer droit au sol, quelques mètres plus loin, et une sorte d’énergie noire commença à l’envelopper. « Non, non, le piège à puissance ! » s’exclama-t-elle en essayant de s’en dégager, le front ensanglanté par le choc qu’elle s’était pris. Le chat la contourna, profitant de sa déconcentration, pour tenter de fuir. Quelle imbécile ! Aussi stupide que ses confrères...

Combat !:

Il n’eut pas fait trois pas supplémentaires qu’elle avait bondi sur lui pour le plaquer au sol, avant de lui coller des coups de poing sur le visage à toute allure. Il ranima une flamme restant dans sa gueule, l’enflamma toute entière, et planta ses crocs enflammés dans le bras droit de la Méditikka. Poussant un hurlement, elle fut forcée de se reculer, et s’effondra finalement en s’évanouissant sur lui. Il soupira de soulagement et secoua la tête, agacé par tous ces Pokémon qui tentaient de l’empêcher de continuer son ascension. Au moins, il s’était débarrassé d’une supplémentaire. Il vérifia instinctivement sa respiration. Elle était, elle aussi, simplement évanouie. Pas envie d’avoir une mort sur la conscience.

Combat !:

Elle aussi, il la déposa dans des fourrés, espérant qu’elle ne se réveillerait pas avant un bout de temps. Plus il mettait hors-jeu d’habitants du village, et plus il risquait d’être recherché. Il suffirait qu’un seul de tous ceux qu’il battait ne se réveille, et à partir de là, il n’aurait plus d’autre choix que de fuir, fuir et encore fuir… Tant qu’ils ne connaissaient pas sa destination exacte, il avait encore une chance de pouvoir sauver le Chuchmur. Mais s’ils réussissaient à déterminer où il allait, il essayeraient sans doute de l’intercepter. Il soupira, et reprit sa course jusqu’au sommet.

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Étage 10 du Mt Labeur

Nathanaël s’arrêta une bonne trentaine de mètres plus haut, s’abritant derrière un rocher pour reprendre son souffle. Depuis qu’il était arrivé dans le cimetière, il se ne s’était plus arrêté de courir ; les choses s’étaient enchaînées bien trop rapidement pour lui laisser le loisir de ralentir, et il devait admettre que c’était plutôt embêtant. Il désirait maintenant faire une pause, pour réfléchir un peu. Le Débugant l’avait informé de la position de son client, mais la véritable question était de savoir comment il allait parvenir à le libérer sans heurts. Il ignorait sa condition exacte, et dans combien de temps il pourrait le faire sortir de sa prison.

Il leva les yeux vers le ciel et fixa les nuages. Ils semblaient plus proches que jamais ; le sommet se trouvait sans doute bien au-dessus. Le Dracolosse pourrait-il nous récupérer directement au point le plus haut… ? se demanda Nathanaël. J’espère bien, on ne pourra sans doute pas redescendre. Il ravala sa salive, se doutant bien que s’il était pris, il subirait le même sort que le Chuchmur, si ce n’est pire. Après tout, l’insecte en armure aurait sans doute été prêt à le tuer s’il lui avait laissé le temps d’agir… De même pour la créature à tête d’ail. Il devait se montrer sans pitié s’il voulait secourir son client, mais il ne se sentait pas prêt à tuer qui que ce soit.

« Vous avez un nouveau message ! » scanda une voix depuis son sac, le faisant sursauter. Il réalisa qu’il s’agissait de son gadget d’explorateur. Il avait oublié de le mettre en silencieux, apparemment. Il le tira à toute allure, espérant qu’il n’aie attiré l’attention de personne, et décida de lire les mots qui lui avaient été envoyés, se demandant bien… Oh. Sylvain. Pourquoi est-ce qu’il me contacte, celui-là ? Il secoua la tête, se refusant d’abord à le lire. Ils n’avaient rien à se dire, et de toute façon, Nathanaël était bien trop occupé par ses propres soucis pour s’intéresser de ceux d’un noble pourri gâté qui refusait d’aider un jeune dans le besoin.

Néanmoins il l’ouvrit. Il soupira en voyant la longueur du texte. Bizarrement, cela ne l’étonnait pas tant que le Feunard soit été du genre à épiloguer pendant trois ans pour expliquer une chose somme toute simple, mais il aurait espéré qu’il fasse un effort pour tenter de maintenir l’intérêt de l’explorateur. Nathanaël lut le texte en diagonale, marmonnant les mots-clés de la lettre, cherchant à en comprendre le sens profond plutôt qu’à détecter les multiples métaphores capillo-tractées employées par un poète un peu trop à fond dans son écriture. Finalement, il en comprit les grandes lignes et referma le message, blasé.

Sylvain s’inquiétait pour lui ; il lui demandait de ne pas prendre de risques inutiles, et de revenir si la mission qu’il avait choisie était trop compliquée. Il expliquait qu’on parlait de sa mission très dangereuse pour un jeune en ville, et qu’il se sentait coupable de l’avoir conduit indirectement à prendre tant de risques, puis lui disait qu’il souhaitait lui parler face à face à son retour. Nathanaël n’avait absolument pas envie de le revoir de sitôt, et comptait lui fausser compagnie s’il essayait seulement de s’approcher de lui. Froidement, il rangea son gadget et se remit en route, chassant les pensées nocives qui tentaient de le persuader de laisser une seconde chance au Feunard.

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Étage 11 du Mt Labeur

À peine avait-il fait quelques pas supplémentaires qu’une sorte d’énergie lumineuse avait commencé à se dégager des nuages, secouant l’air et le soleil. Un instant plus tard, ce fut une onde qui dévala du ciel, remuant la tête et ébranlant Nathanaël de part en part. Il fit quelques pas en arrière, déstabilisé ; et il vit ses pattes s’illuminer d’une lueur rougeoyante. Croyant qu’il prenait feu, il frappa ses pattes sur le sol, avant de les voir gagner en volume. « Mais qu’est-ce qui m’arrive ?! » s’écria-t-il en jetant sa sacoche à côté, tandis que la lueur remontait le long de son corps.

Il s’efforça de se libérer, espérant que s’agiter l’empêcherait d’être recouvert. Il sentit des caresses, des chatouilles, et toutes autres sensations hautement désagréables ; l’instant d’après, il était effondré sur le sol, et s’apercevait qu’il n’était plus exactement un Flamiaou. Effondré sur le ventre, il rechercha à reprendre appui, et s’aperçut qu’il n’arrivait plus à tenir sur quatre pattes. Il cligna des yeux, ne comprenant pas, puis regarda ses pattes avant. Il remua ses doigts, et constata l’apparition de deux pouces opposables. En réalité, il avait de grosses mains couvertes de fourrure. Il se redressa brusquement, retombant sur l’arrière-train, avant de regarder l’intégralité de son corps.

Il ressemblait désormais à une sorte de mix étrange entre un tigre, une créature humanoïde, un catcheur et des anabolisants. Il frappa son torse couvert de tablettes de chocolat et plissa les yeux, trouvant cela absolument ridicule tant c’était exagéré. Il se demanda ce qui lui était arrivé exactement, s’efforçant de prendre appui sur une pierre pour se redresser. Il était désormais beaucoup plus imposant, et s’avoua que cette taille et ce volume, bien qu’assez intimidants, entravaient sa mobilité et sa vitesse. Et puis cet aspect était plus que ridicule : il avait même une ceinture de feu qui brûlait constamment.

D’un certain côté, il se sentait plus humain, désormais. Il avait deux bras et deux jambes bien distincts, et pouvait se tenir sur deux pattes -mais il lui fallait un temps d’adaptation. Maintenant, il avait de véritables mains, et n’avait pas l’impression d’être un chaton riquiqui. Néanmoins, il ne réussissait pas à se faire à cette apparence. Elle était laide, désagréable, et plus encore, grotesque. N’importe qui l’aurait vu, et il se serait moqué de lui. Même lui devait se tenir pour ne pas faire de plaisanterie. En se tournant un peu, il réalisa que sa queue ressemblait à une banane qu’on avait essayé de peler. Non, vraiment, pourquoi ? se demanda-t-il en poussant un feulement de rage.

Il attrapa sa sacoche d’aventurier, dut l’ajuster parce qu’elle était désormais beaucoup trop petite, et se décida à reprendre sa route malgré sa métamorphose. Il n’avait pas de temps à perdre ; il avait sans doute gagné en force grâce à cette transformation, et il comptait bien miser sur cette puissance brute pour compenser son manque d’habitude, mais il n’allait certainement pas accepter de rester ainsi éternellement. Dès qu’il aurait l’occasion, il essayerait de trouver un moyen de redevenir comme avant. Il repensa au Chenipan qui lui avait parlé des Donjons Mystère. Peut-être était-ce un des coups de cette histoire : après tout, il ne connaissait personne se transformant spontanément.

C’était impossible que son apparence puisse changer naturellement, de toute façon...

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Étage 12 du Mt Labeur

Il continua à grimper durant de nombreuses minutes, essayant de tenir sur deux pattes et s'apercevant que c'était réellement désagréable de voir que le poids de son corps était désormais orienté complètement différemment. Instinctivement, il marchait à deux pattes, son équilibre ayant été redirigé dans ce sens ; mais il y trouvait une sensation affreusement désagréable, bien que ce fusse plus humain, aussi décida-t-il de se remettre à courir à quatre pattes. Il avait l'impression d'être bien plus rapide de cette façon-là. Il vit bondir devant lui la silhouette d'une créature marron avec des gants rouges, qui ressemblait à un boxeur : il crut à un assaillant et se prépara à l'attaquer, mais l'autre l'interrompit. « Eh, Sean, ce n'est que moi, Pierre ! Calme-toi !
- Hein ?
- Ouhlà... t'es confus ou quoi ? Ils t'ont demandé de remonter jusqu'ici à cause de la vague d'énergie ?
- La vague d'énergie ?
- D'après ce que j'ai compris, c'est le bordel partout à cause des évolutions temporaires. Je pensais que tu serais pas affecté, vu que... bah... t'es déjà un Félinferno.
- ...
- Tu... n'as pas l'air en forme. Je comprends qu'ils t'aient laissé partir plus tôt. Va dormir. »

Il comprit qu'on le prenait pour quelqu'un d'autre ; par chance, il avait apparemment pris l'apparence d'un autre habitant du village. Un Félinferno, s'il avait bien entendu. Peut-être pouvait-il jouer sur ça pour tenter d'atteindre la cage du Chuchmur et le libérer. Il comptait bien essayer en tout cas. S'efforçant de prendre une voix plus grave que d'habitude, arrachant et cachant discrètement son badge d'explorateur dans son sac, il grogna : « Nan, nan, ça va. On m'a juste envoyé vérifier si tout se passait bien ici. Les autres ont pensé que ce serait une meilleure idée d'avoir du monde ici, avec la vague d'énergie.
- Hah ! Oui, bonne idée. D'ailleurs, je vais aller vérifier si Taki va bien, elle est restée seule à la maison.
- Je l'ai croisée en passant ! s'écria Nathanaël, comprenant qu'il parlait de la Méditikka qu'il avait vaincu un peu plus tôt. Elle va bien, t'inquiète.
- Okay, super, je vais directement foncer à la garderie pour voir si Julia s'en sort avec les gamins. Je compte sur toi pour aider à la prison, du coup.
- Pas de soucis, je gère. »

Le dénommé Pierre s'élança vers un embranchement plus bas et Nathanaël soupira de soulagement. Bon, j'ai une couverture. Faut juste espérer que le vrai Sean ne remonte pas de sitôt. Il leva les yeux vers le sommet de la montagne, et se demanda pour combien de temps il en avait. Au moins, pour le moment, il n'avait plus à craindre de devoir affronter qui que ce soit ; il ne savait absolument pas comment utiliser ses pouvoirs sous cette apparence complètement différente.

Il partit pour reprendre son ascension et croisa plusieurs autres Pokémon affolés : aucun d'entre eux ne l'interrompit, ils le prenaient tous pour le fameux Sean. Si quelqu'un venait à lui parler, il improvisait, et il se débrouillait plutôt bien pour ça. Il fallait juste croiser les doigts pour qu'il réussisse à atteindre le sommet sans encombre, maintenant. Il arriva bientôt au niveau d'une zone plus citadine, nichée dans les plus grandes hauteurs. C'était un village à moitié troglodyte, mais les citoyens semblaient absents. Sans doute occupés avec leur catastrophe.

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Étage 13 du Mt Labeur

Il slaloma plus ou moins agilement entre les bâtiments et les rues, essayant de trouver des points d’ascension lui permettant d’accéder à des niveaux supérieurs. Mais plus il s’avançait, plus il constatait que ce village était un véritable labyrinthe et qu’atteindre le sommet allait s’avérer terriblement compliqué s’il ne disposait pas de guide. Il n’osait demander de l’aide aux citoyens qui l’entouraient, inquiété à l’idée qu’ils ne devinent qu’il n’était normalement pas un villageois. Sa marche le porta finalement près d’une falaise à l’écart de tous, et il profita de cet instant de solitude pour sortir à nouveau son gadget d’explorateur.

Il eut beau chercher à travers toutes les fonctions qui y étaient proposées, Nathanaël ne parvint pas à en trouver une qui lui permette d’accéder à une carte, quelle qu’elle soit. Il baissa les oreilles, profondément agacé par son errance. Plus le temps passait, et moins il avait de chance de réussir à secourir le Chuchmur. Il cligna alors des yeux et regarda ses pattes ; si tous les gens avaient changé d’apparence, peut-être lui aussi était concerné. Néanmoins, ce serait réellement embêtant, car il ne pourrait alors probablement pas le reconnaître. Il soupira longuement, se grattant la tête et cherchant une solution à son problème.

C’est alors que quelqu’un prit position à ses côtés. C’était une petite créature humanoïde marron et bleue, avec une pointe sur la tête, qui avec des bras longs et assez étrange. Elle regarda Nathanaël quelques instants et il mima une passivité absolue, tandis qu’il rangeait innocemment son gadget dans son sac. Son voisin lui lança : « C’est moi, Débugant. Sean est resté en bas au moment de l’évolution, j’ai donc deviné que ce devait être vous, avec le sac.
- J’ai quoi comme preuve que c’est bien toi, eh ?
- Je suis celui qui a envoyé la mission que tu cherches à accomplir. Cela suffit-il ? »

Nathanaël n’était pas convaincu mais il n’avait pas réellement d’autre choix que de bien vouloir le croire. Si quelqu’un pouvait réussir à le guider jusqu’au sommet, c’était bien ce fameux Débugant, même s’il n’en avait plus du tout l’aspect. « Nommez-moi Kapoera pour le moment, affirma-t-il alors. Il y a de nombreux Débugant en ville, aussi pourrai-je éventuellement vous aider en cas de combat, car ils ne sauront pas de qui il s’agit.
- Ils remonteront pas jusqu’à toi ? » marmonna le félin de feu, perplexe. Le surnommé Kapoera secoua négativement la tête et son interlocuteur haussa ainsi les épaules. S’il se sentait prêt à prendre le risque, grand bien lui en fasse ! S’ils étaient deux et qu’il était là pour le guider, leurs chances de pouvoir libérer le Chuchmur augmentaient nettement. « Ouais, bah alors allons-y. J’ai pas envie que Sean revienne et que je me fasse choper, moi... »

Il parut tout à fait d’accord et le duo fit donc demi-tour pour se remettre à monter. Nathanaël suivait son compagnon improvisé dans un silence total, s’apercevant qu’une fois de plus, il avait besoin d’être materné par quelqu’un pour parvenir à ses fins. Il était tout simplement incapable d’accomplir une mission sans devoir bénéficier d’un soutien… Il soupira longuement de désespoir, agacé par sa propre faiblesse. Est-ce que j’arriverai un jour à me débrouiller tout seul, au moins ? J’ai l’impression d’être un gamin incompétent, c’est d’un blasant…

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Sujet: Re: Mission 3 [Solo] Cris du Coeur

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